Mulhouse, Colmar et la route des vins
Milhusa im Elsass (Mulhouse) !
Elle fait partie, comme " Rome », de ces villes dont la fondation repose sur une légende : une meunière aurait recueilli un soldat blessé gisant près du moulin et serait marié avec lui ensuite. Suivant les versions, ce fut sous Jules César ou, plus tard, lors des invasions germaniques du Vèmes.s.
La fondation légendaire de Mulhouse : une meunière recueille un soldat blessé. Peter Becker (1897).
Brève histoire ( très brève) !!
Une histoire mouvementée entre France, Allemagne, et suisse. Ainsi, après avoir fait partie du Saint Empire Romain Germanique au moyen-âge, elle sera une République réunie à la Confédération Suisse de 1515 à 1798. En 1798, elle deviendra française. Déjà à cette époque, la révolution industrielle, qui œuvrait partout en Europe de l’Ouest, avait atteint Mulhouse avec l'établissement des Manufactures de textiles.
La " Manchester" française possède peu de maisons à colombages comme Strasbourg ou Colmar. Sa vocation de ville industrielle dès le XIX èmes.s vient du fait qu'elle est d'abord une ville rhénane. Ainsi, de nombreux canaux de déchargements subsistent aux abords du centre historique. Ils sont reliés aux Rhin et servaient à décharger ou charger les matières premières et marchandises en provenance ou partance pour les grands ports du Nord de l'Europe comme Rotterdam ou Anvers et les villes allemandes et suisses sur le Rhin (Bâle, Cologne ...) La ville est marquée par ce caractère industriel dont de nombreux bâtiments subsistent mais ont été transformés depuis. La ville aux cent cheminées comme on disait autrefois n’est, certes, pas aussi typiques que Colmar par exemple, mais elle mérite une visite pour ce patrimoine industriel et pour le musée du train ou celui de l’automobile, le plus grand d’Europe. De nombreuses entreprises sont originaire de Mulhouse ( Schlumberger, Alcatel, Alstom: la BNP, DMC ) ou ont un lien avec cette ville ( Boeing).
Aujourd’hui, elle connait une véritable transformation en s’appuyant justement sur ce riche passé industriel. Non en l’effaçant mais en le sublimant. Elle met des couleurs sur ses façades grises et célèbre la richesse de ce passé. Après tout, son nom, Mulhouse - « maisons du moulin » en alsacien francisé- témoigne, dès ces origines, de ce caractère industriel .
Ci-dessous quelques photos comme la célèbre tour de l’Europe et ses 112 m avec son restaurant tournant (en panne à l’heure actuelle) :
Colmar :
La « petite Venise alsacienne » est une cité de quelques 100 000 hbts, parée de centaines de maisons à colombages. Colmar est un condensé de l’Alsace tant pour son architecture que pour la gastronomie et les vins avec ses nombreux Winstub (restaurants). Les plus anciennes maisons datent de plus de 500 ans comme la maison Pfister ou le Kohlus. Parcourir cette ville, c’est remonter le temps en imaginant ce qu’était la vie d’une ville à la fin du moyen-âge et pendant la période de la Renaissance. Beaucoup de ces maisons abritait des marchands -bouchers, tanneurs, boulangeries – signalaient par une enseigne particulière .
Thann :
Situé au début de la route des vins d’Alsace, au pied des Vosges, elle est surtout connue pour sa collégiale, une des plus réalisations de l’art gothique flamboyant en Alsace, notamment sa flèche, avec la cathédrale de Strasbourg, On trouve dans la collégiale un imposant orgue. Les habitants disent de son clocher que « si Strasbourg à le plus haut, Fribourg, le plus gros, Thann est le plus beau ! » rien que ça !
Splendide représentation de l’art gothique rhénan, la collégiale Saint-Thiebaut doit son nom à Ubald Baldassini, un saint et évêque italien du XII èmes. s, qui ,passant à Thann, aperçu trois sapins en feu dans le ciel . La collégiale possédait une relique de ce Saint au moyen-âge. La fête de la crémation des trois sapins ,commémore chaque année cette évènement.
VIGNOBLES :
Le cru Rangen : le vin des sorcières !
Thann est le début de la route des vins qui s’étend jusqu’à Wissembourg, 170 km plus au nord. Le cru Rangen est le plus sudiste des 51 Crus D’alsace. Il débute au-dessus de la bien (ou mal !) nommée tour des sorcières. C’est une petite parcelle très pentue qui surplombe la rivière au-dessus de Thann. Les cépages nobles que sont le pinot gris, le riesling ou le gewurztraminer sont cultivés sur ces coteaux plutôt abrupts orientés plein sud. Ce sol granitique et volcanique convient particulièrement au riesling. C’est le seul terrain volcanique d’Alsace -l’Alsace est un patchwork géologique- c’est un vin magique, « ressuscité » récemment par une poignée de vignerons. Il a ainsi retrouvé son lustre d’antan. Célébré autrefois pour son pouvoir « diabolique », il pousse au-dessus de « l’œil de la sorcière », vestige d’une tour médiéval situé au bord de la rivière Thur. Tant de sorcières, de « fiancées de Belzebuth » ont été immolées en ces lieux. Leurs convulsions de douleurs sur le bûcher de ces prétendues pécheresses résonnent comme un écho avec le feu des laves des volcans qui se dressaient ici, il y des millions d’années.
Ces ténébreuses affaires se confondent avec la puissance énigmatique que dégage ce cru. Enigmatique, magmatique, gothique comme la cathédrale. Le vin vient directement de cette terre qui a souffert tant des convulsions de la roche que des âmes injustement condamnées par des hommes soi-disant de foi ! les anciennes chroniques mentionnent « les effets troublants de ce vin capiteux » !
Toujours est-il que ce vin tomba dans l’oubli et ses coteaux abandonnés. Aujourd’hui, c’est un des Crus les plus rares et chers. Une exceptionnelle concentration d’arômes, de la puissance, de la vigueur en font un nectar recherché des amateurs.
Orschwihr :
Au pied des Vosges, le Grand Cru Pfingstberg, s’étend sur les coteaux qui surplombent le village d’Orschwihr. Son terroir, plus « jurassien » que « Vosgiens », le Massif du Jura et ses calcaires se mêlant aux grès des Vosges. On découvre ainsi des vins de riesling, pinot gris, ou gewurztraminer empreint de minéralité propre au terroir calcaires. C’est le seul terroir calcaire de la route des vins. Des vins amples, denses avec beaucoup de matières en bouche qui offrent une belle longueur et une aptitude à la garde. Ainsi, en dégustant un pinot noir de chez Camille Braun de millésimes 2016 et le même plus récent ,2020, j’ai pu constater combien il s’est bonifié avec le temps. Les vins blancs de pinot gris sont fumés, voire cendrés. Le riesling est fin et aérien. Le gewurztraminer est aromatique, exotique. Tout ces cépages demandent à vieillir pour s’arrondir et révélé leurs complexités.
Dégustation : gewurztraminer : Camille Braun-cuvée Saint Nicolas-Bollenberg-2020-
Au nez, notes aromatiques de litchi et de fruits exotiques : En bouche, on s’attend à un vin riche et gourmand, sucrée mais c’est une acidité marquée qui frotte le palais d’un voile de légèreté aromatique et aérienne. Bu avec un pâté campagnard de Laroquebrou (Cantal) et des cornichons. Le tout sur une musique punk irlandaise des pogues, quel voyage !
Une autre colline, le Bollenberg, orienté plein sud, est très sec. Cette « garrigue alsacienne » reçoit ainsi trois fois moins d’eau que Biarritz ! c’est le domaine du pinot noir. Le pinot noir demande à vieillir pour s’affermir et développer des arômes complexes portés sur les fruits noirs.
Cette colline , le Bollenberg, tire son nom d’un ancien dieu celte . Aride et sec, c’est le domaine de la huppe fascié. j’achevrerais ce petit tour dans le vignoble alsacien en déjeunant dans une auberge au cœur de la forêt des contreforts vosgiens , le Domaine du Hirtz .